C’est également à cette occasion, à Paris en 1924, que sera créée la FIDE, Fédération Internationale Des Échecs. J’espère d’ailleurs que le centenaire de l’évènement sera à la hauteur des attentes en 2024 à l’occasion des jeux Olympiques à Paris !
Jeux olympiques — La France, qui a constitué la Fédération Internationale des Échecs, à Paris en 1924, est invitée a envoyer des joueurs aux tournois d’Échecs, qui auront lieu à La Haye, a l’occasion des Jeux olympiques, en juillet 1928. Une équipe de 5 joueurs devrait être envoyée, pour rendre aux nations venues à Paris en 1924 leur politesse.
Trois mille francs sont virés au compte dit olympique. pour indication. La F. F. E. devra toutefois renoncer à être représentée dans les tournois, si l’appel fait à ceux qui s’intéressent à l’honneur national échiquéen fait défaut.
MM. Egeley et L. Monvoisin, rédacteur de la chronique d’échecs de La Liberté, sont spécialement chargés de solliciter des concours généreux, principalement en demandant à toute la presse française échiquéenne l’ouverture d’une souscription : Vingt mille francs sont à trouver par cette voie. Si non, nous déclarerons forfait, par faute de moyens financiers.
Il est question de « tournois d’échecs » au pluriel. Effectivement, à l’époque, les Olympiades consistaient alors en un tournoi par équipe de 4 joueurs (tournoi B) et d’un tournoi individuel (tournoi A).
Comme convenu, un appel à souscription est lancé dans le journal La Liberté du 6 février 1928. Mais d’autres journaux qui ont vent de l’affaire s’y mettent également, par exemple dans le journal La Patrie du 3 février 1928 en première page, avec une pointe d’ironie.
Chacun sait que si la boxe est le « noble art », la cavalerie des rois, des dames, des tours, des chevaux et des fous demeure, par excellence, « le noble jeu ». La mode a beau flatter tour à tour le bridge ou le mah-jong, passer par le puzzle pour aboutir à la démocratique belote, le échecs, eux, solides au poste et indifférents à ces engouements, gardent leur faveur, aujourd’hui comme au temps de la Grand Catherine.
« Propager le jeu d’échecs en France. c’est servir le pays ! »
L’heure est grave pour les échiquiers français !
– Quel péril nouveau les menace ?
– Une défaite d’amour-propre dont ils se laveraient difficilement. Sachez donc qu’en 1928, la France est invitée, à l’occasion des Jeu Olympiques d’Amsterdam, à envoyer aux tournois d’échecs qui seront organisés : cinq joueurs et un délégué au Congrès. Or la Fédération n’a pas les moyens financiers d’envoyer une équipe à La Haye ! Elle ne pourra rendre aux nations qui sont venues à Paris, en 1924, la politesse de répondre à leur invitation, que si les moyens de subventionner le déplacement de ses représentants lui sont fournis. Si nous ne les trouvons pas, sil es pouvoirs publics et les personnes généreuses ne nous viennent pas en aide, la France déclarera forfait pour le tournoi où 23 nations seront représentées. On a trouvé de l’argent pour les muscles, le refusera-t-on au cerveau ?
– Il vous en faut beaucoup ?
– Vingt mille francs. Nous ne sommes pas gourmands.
Lui apparaitra-t-il que le prestige de l’intelligence française à l’étranger s’affirme mieux par un tournoi d’échecs que par un discours ampoulé ?
Laissera-t-elle, faute d’argent, sur ce domaine de l’esprit, mettre la France « échec et mat » ?
Personne ici ne le croira.
Jean Brétigny
Ou bien par exemple dans la presse régionale, dans le journal Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire du 13 février 1928
La liste des souscripteurs se termine par « Nous irons à La Haye !… », mais en page suivante la FFE indique qu’il n’y aura pas d’équipe, seulement un représentant pour le tournoi individuel.
Nous n’irons pas au tournoi par équipes.
C’est avec cette poignée de souscripteurs, grossie de quelques dévoués organisateurs, que notre France échiquéenne poursuit sa marche pénible mais ascendante vers un destin qu’une foi inébranlable nous montre heureux. Quand même !
Puis, après cette note de pessimisme, c’est le mutisme jusqu’en juillet 1928 à quelques jours du début de la compétition.
La Liberté 8 juillet 1928 – Source Euronews
(…) Nous connaissons le nom de tous les représentants des pays étrangers…sauf ceux de nos compatriotes. Peut-être la France n’enverra après tout qu’un concurrent pour le tournoi individuel ? Nous ‘en savons rien, le mutisme de la FFE ne nous permet pas d’écrire quoique ce soit à ce sujet, nous reparlerons si le secrétaire nous en touche un mot…
Le tournoi commencera le 21 juillet et se terminera le 5 août.(…)
Bulletin de la FFE – Octobre 1928 – Fonds Mennerat, Belfort
La France sera représentée au Tournoi olympique : dans le tournoi A (individuel), par A. Chéron, champion de France ; dans le tournoi B (par équipe de quatre), par A. Muffang, R. Crépeaux, M. Duchamp et L. Betbeder. C’est une excellente équipe, des mieux composées.
Mais restons objectif, qui s’intéresse au jeu d’échecs à part son microcosme ? Gaston Legrain s’en fait l’écho dans sa chronique d’échecs dans l’Action Française.
Le Tournoi olympique
Dans une lutte par équipes comprenant quatre de leurs meilleurs amateurs, 17 nations sont réunies à La Haye et s’efforcent de faire valoir leur suprématie dans le sport intellectuel des échecs.
Voilà, direz-vous, une manifestation mondiale vraiment digne d’éveiller la curiosité publique.
Oui, mais il faudrait que notre grande presse d’information daignât en souffler mot. Or, elle ne reproduit même pas les dépêches d’agences qui annoncent chaque jour les résultats. Déplorons ce silence que nous constations déjà, en 1924, au tournoi olympique de Paris.
Ces difficultés, de réunir des fonds pour une équipe de France, s’ajoutent à toutes les difficultés financières de la FFE depuis sa création en 1921. Pierre Vincent, secrétaire de la FFE, est désabusé, la FFE est en crise, et cela fera l’objet d’autres articles…
Appel à nos amis
Dans quelques semaines nous nous réunirons en assemblée générale. La grave question de notre existence doit y être examinée. Déjà nos appels ont été nombreux ; déjà nous avons fait part de notre détresse, et secourus en temps utile par des mécènes, nous avons vécu au jour le jour, mais nous avons vécu. Nous avons grandi en nombre. Nous avons formé des Cercles. Nous avons fait des adeptes. Nous sommes a la veille d’interrompre cet effort
de persévérance, parce que les cotisations ne rentrent pas, et que nos fonds sont pratiquement épuisés (…)
En ce qui me concerne, cinq années de mendicité perpétuelle, de rebuffades, d’inutiles campagne, m’ont désabusé et profondément lassé.(…)
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